Eat’s Business #35
Dans ce nouvel épisode de Eat’s Business, la revue de presse du Business de la Bouffe, Olivier Frey et Daniel Coutinho reviennent sur les actualités food de la semaine. Aujourd’hui on évoque la culture des vignes de prosecco qui pose des problèmes environnementaux, la tendance du raclette bowl et l’huile d’olive italienne poussée à l’exportation.
On parle aussi de la cancoillotte en route pour l’IGP, de la stratégie d’un des supermarchés préférés des français Grand Frais et de l’histoire de la plus grosse fraude au bio aux Etats-Unis.
Le Monde, Le prosecco, des bulles pas si légères pour l’environnement, 15/11/2021
Un article que les aficionados du Spritz devraient lire avec attention.
Alors que, selon l’article, la production de prosecco a plus que quadruplé depuis 2009, un nombre croissant d’habitants de sa région de production expriment leur mécontentement. Et d’ailleurs même les hommes d’église s’y mettent. C’est le cas par exemple de l’évêque Corrado Pizziolo, qui cible directement les producteurs de prosecco lorsqu’il indique dans un message pastoral « Nous sentons monter depuis le territoire le rappel du respect de l’environnement et de la santé des personnes, menacée par l’abus desdits “pesticides” ».
Comme l’explique l’article, si l’explosion de la demande au niveau mondial pour le prosecco est une bénédiction pour l’économie locale, elle a également provoquée un accroissement accéléré de la surface du vignoble. Désormais ce sont plus de 20 000 hectares qui lui sont consacrés entre les régions de Vénétie (75 % du total) et de Frioul-Vénétie-Julienne.
La tendance étant toujours haussière en 2021, il n’y aurait selon Denis Pantini, un économiste spécialiste du marché des vins et spiritueux, “que deux solutions : augmenter les prix ou augmenter la production”.Or vu le positionnement prix du prosseco, “le potentiel de hausse des prix” est assez faible. Par conséquent, il reste la solution consistant à étendre la zone de production pour accroître les volumes. Un autre problème mis en avant par un spécialiste du marché du vin italien : “pour ce type de vin, les pesticides sont une sorte de fatalité. Pour que la viticulture soit rentable, il faut produire beaucoup, ce qui implique des traitements”.
Usbek & Rica, Le « Raclette bowl », ultime alerte avant la mort du vivre-ensemble, 08/11/2021
L’enseigne Picard vient de sortir un tout nouveau produit : un raclette bowl. Et ce dernier fait notamment beaucoup parler sur les réseaux sociaux.
Comme l’explique l’article, “la saison de la raclette ouvre en général un nouveau cycle de fêtes où la possibilité de faire fondre de petites tranches de fromage est surtout le prétexte à se retrouver, entre amis ou en famille”. Or, évidemment ce raclette bowl a pour vocation à être consommer seul.
Mais, comme l’explique l’article, ce raclette bowl n’est finalement qu’un bowl de plus sur un marché où il existait déjà des “fondue bowl” ou des “aligot bowl”. Un “bowl” est “conçu pour être ingurgité seul, il ramène toute nourriture qui fait signe vers le collectif, la joie, le partage à une morne expérience de dégustation face à soi-même”.
Bref, vous l’aurez compris, l’auteure de l’article en a “ras le bowl des bowl”.
Les Échos, Quand la guerre des prix en Italie pousse les oléiculteurs à l’exportation, 13/11/2021
Il n’y a pas qu’en France que la guerre des prix entre les enseignes de la grande distribution fait rage. En Italie elle concerne en particulier l’huile d’olive.
Ainsi, comme l’explique Daniela Pontecorvo, directrice marketing de Costa d’Oro, « le marché italien est le plus gros marché en volume, mais c’est aussi le plus concurrentiel. Près des trois quarts des ventes en GMS sont en constante promotion ». Par ailleurs, le marché italien de l’huile d’olive est assez atomisé. En effet, d’après l’article, la marque la plus vendue (Farchioni) ne représente pas plus de 10 % des ventes.
La planche de salut pour les oléiculteurs italiens est donc l’export. En effet, comme l’explique Daniela Pontecorvo, “en France, le prix moyen est de 7,25 euros le litre contre 4,60 euros en Italie”.
L’Est Républicain, La cancoillotte, emblème de la gastronomie franc-comtoise, en route vers l’IGP, 14/11/2021
La cancoillotte est un des produits emblématiques de la gastronomie franc-comtoise. Elle se mange chaude ou froide, nature ou aromatisée. Alors qu’elle pourrait décrocher l’IGP (indication géographique protégée) en 2022, l’article (très complet) revient sur son histoire, ses origines, ses secrets de fabrication et son poids dans l’économie locale.
On apprend par exemple qu’elle est née au XVIe siècle dans une ferme à Oyrières, en Haute-Saône et qu’elle est en fait issue d’une erreur de fabrication. La production a atteint 5200 tonnes en 2019 et est réalisée par 16 fabricants à partir du lait de 400 éleveurs.
Le dossier pour la labellisation IGP a été déposé en 2015 et, selon l’article, la cancoillotte “n’a jamais été aussi près de recevoir le label IGP”. La zone de production de la cancoillotte deviendrait alors limitée à la Haute Saône, le Doubs, le Jura, le Territoire de Belfort et quelques communes des Vosges, de l’Ain, de la Côte d’or, de la Haute Marne et de la Saône et Loire.
Les producteurs de cancoillotte aimeraient s’appuyer sur cette IGP pour augmenter leurs ventes. L’article explique ainsi qu’à l’heure actuelle “80 à 85 % de la cancoillotte produite est consommée dans l’Est de la France” mais qu’il y a “un intérêt qui se développe au-delà de la Franche-Comté”.
Merci à un de nos fidèles lecteurs francs-comtois de nous avoir envoyé cet article.
Stratégies, Le bonheur est dans le Grand Frais, 12/11/2021
Focus sur une enseigne qui vient d’entrer dans le top 10 des enseignes préférées des Français selon une étude EY-Parthenon. Grand Frais compte à ce jour 264 points de vente dans l’Hexagone.
Comme le détaille l’article, “entrer chez Grand Frais, c’est comme entrer dans un marché couvert dont on aurait réinventé le concept en le modernisant et en en adaptant les codes”. Comme l’explique un consultant, “Grand Frais a marketé le marché de rue et en a fait un commerce commercial”.
La stratégie de l’enseigne est bien résumée par un autre consultant pour qui, elle “repose sur une offre large et profonde, la meilleure gustativement parlant, et ils s’appuient sur une mise en scène organisée, structurée, massifiée”. De plus, comme l’explique l’article, les rayons “sont systématiquement remplis, quitte à ce que, au bout du compte, des pertes soient à déplorer”. Ainsi, le revers de la médaille d’une telle stratégie est qu’ils “enregistrent globalement plus de casse, 12 à 15% contre 7% en moyenne pour les fruits et légumes”.
Autre élément stratégique mis en avant par un consultant : “l’ensemble des investissements a été mis dans le produit, il n’y a pas d’investissement média, et cela se voit. La valeur est injectée dans le produit, pas dans le marketing”.
Enfin, Grand Frais se distingue par son modèle d’entreprise. En effet, il s’agit en fait d’un GIE, au sein duquel sont réunies des enseignes spécialistes, que ce soit pour la viande, les fruits et les légumes, la poissonnerie, la crèmerie ou encore l’épicerie. C’est donc “un modèle à part dans le paysage français voire européen”.
New Yorker, The Great Organic-Food Fraud, 08/11/2021
Un article très long mais passionnant sur l’histoire invraisemblable de Randy Constant et de la fraude au bio qu’il a mis en place via l’entreprise Organic Land Management qu’il a co-fondé en 2001.
Comme l’explique l’article, le consommateur de produits biologiques achète à la fois un produit et une assurance sur un produit. Techniquement parlant, les cultures biologiques sont celles qui, entre autres restrictions, ont été cultivées sans l’application de certains herbicides, pesticides et engrais. Ainsi, un examen minutieux d’une récolte de tomates non biologiques pourrait révéler qu’elles ont été exposées à ces traitements. Toutefois, les tests de détection des résidus ne sont pas courants dans la réglementation biologique américaine. Comme l’explique l’article, la vraie différence, alors, entre une tonne de soja biologique et une tonne de soja conventionnel, c’est l’histoire que vous pouvez raconter à leur sujet.
Entre 2000 et 2005, les ventes d’aliments biologiques ont presque doublé aux Etats-Unis, pour atteindre 13,8 milliards de dollars par an. C’est un nouveau système national de certification biologique, pleinement mis en œuvre en 2002, qui a contribué à stimuler cette croissance. Auparavant, comme l’explique l’article, un agriculteur de l’Iowa pouvait devenir biologique en signant une simple déclaration sous serment attestant qu’il pratiquait l’agriculture biologique. Parmi les nouvelles règles édictées en 2002, les terres soumises à des traitements non biologiques ne pouvaient être converties à la production biologique du jour au lendemain. Le processus devait prendre trois ans. Or, vu la rapidité avec laquelle le marché biologique se développait dans le pays les terres qui ne nécessitaient pas de période de transition devenaient précieuses.
C’est là qu’Organic Land Management intervient. La société a proposé de trouver de telles terres et, en échange d’une part des bénéfices de l’agriculteur, de les faire certifier, puis d’aider à la culture et à la commercialisation des récoltes. En quelques années, Organic Land Management s’occupait de six mille acres, sur une douzaine de fermes dans cinq États. Surtout, aux yeux des régulateurs américains, il s’agissait d’une seule et même exploitation, qui ne nécessitait qu’une seule certification biologique. Et comme l’explique un négociant en céréales, “certains certificateurs indiquent la superficie sur la certification. D’autres ne le font pas. Ce n’est pas une exigence de l’U.S.D.A.”
Et c’est ainsi que Randy Constant a, pendant des années, fait passer des céréales non biologiques pour des céréales biologiques. Ce stratagème est la plus grande fraude connue de l’histoire de l’agriculture biologique américaine. D’ailleurs les procureurs l’accusent d’avoir vendu pour au moins 250 millions de dollars de produits faussement étiquetés avec des certificats biologiques.