Eat’s Business #14 | Conséquences du gel sur la viticulture française, nouveau livre antigaspi de Estérelle Payany et l’évolution de la FoodTech en 2020 | avec la participation de Estérelle Payany, journaliste et critique culinaire

20/04/2021

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Eat’s Business #14

Dans ce nouvel épisode de Eat’s Business, la revue de presse du Business de la Bouffe, Olivier Frey et Daniel Coutinho reviennent sur les conséquences du gel sur la viticulture et l’arboriculture française, le nouveau livre de recettes anti-gaspillage d’Estérelle Payany, ainsi que sur l’évolution de la FoodTech en Europe en 2020.

Dans cet épisode, sont aussi évoqués la filière asperge française, le groupe Avril qui se sépare de ses activités liées aux protéines animales, le faux-mage ou fromage végétal, et le retour du vin envoyé dans l’espace par la startup française Space Cargo Unlimited.

Episode de gel catastrophique pour l’agriculture française

Le Figaro, Au chevet des vignobles, un cauchemar de feu et de glace, 08/04/2021

Les Echos, Le gel menace la production 2021 des grands vignobles français, 09/04/2021

Marianne, Vignoble ravagé par le gel : « une marque claire et nette du changement climatique », 09/04/2021

Les Echos, Les récoltes de fruits de la vallée du Rhône compromises par le gel historique, 09/04/2021

Une série d’articles consacrés à l’épisode de gel de la semaine dernière, qui a été reconnu comme l’un des pires que l’agriculture française ait jamais connu.

Dans le premier article, le journaliste a suivi un viticulteur bourguignon lors d’une des premières nuits de gel. Malgré toute la technologie actuellement disponible, le viticulteur précise que le bon vieux thermomètre à mercure reste « le seul indicateur de température vraiment fiable ». Cela s’explique également par le fait que certains domaines viticoles sont encore situés en zone blanche, donc sans couverture 3G, et que les thermomètres connectés sont donc inutilisables. Mais finalement ce n’est pas tant cet épisode de gel en plein mois d’avril qui est problématique que l’hiver doux qui l’a précédé et a fait pousser les bourgeons plus tôt. On y a apprend également que les gelées observées la semaine dernière ne sont pas “radiatives” (ie. des gelées localisées et circonstanciées) mais “advectives” (ie. causées par l’arrivée d’importantes masses d’air froid).

Pour lutter contre le gel, les viticulteurs ont mis au point plusieurs techniques :

  • la première, dite d’aspersion, consiste à asperger de l’eau sur les vignes, qui s’entourent ainsi d’une épaisse couche de gel qui va enrober les bourgeons et les garder à une température constante, proche de zéro.
  • la seconde consiste à brûler des feux de paille, dont la fumée produit de fines particules au dessus de la vigne et repousse ainsi l’air froid.
  • la troisième consiste à allumer des bombonnes de paraffine réparties tous les quelques mètres le long de chaque rang
  • la dernière plus coûteuse, consiste à installer des câbles chauffants le long des rangs de vigne qui empêchent les plants de geler.

Le second article fait une synthèse des dégâts dans les différentes régions viticoles. On apprend que cet épisode de gel aurait touché 80% du vignoble français et que le gouvernement va déclencher le plan calamité agricole. Dans la vallée du Rhône, au moins 40% des vignes ont été “brûlées” par le gel. Dans le Bordelais, certaines zones (Graves, Entre-deux-Mers, Blayais, Libournais) ont été plus touchées que d’autres. En Bourgogne, la totalité des 30 000 hectares de vignes a été touchée mais à des degrés divers. En Languedoc, les pertes sont hétérogènes et vont de 20 à 75% et ce sont notamment les appellations Flaugergues, Saint-Chinian ou encore Corbières qui ont été les plus touchées. En Champagne, la situation semble également assez hétérogène avec entre 20 et 70% des bourgeons qui ont été impactés par le gel. En Alsace, les vignobles ont été moins touchés car seuls les cépages précoces comme le gewurztraminer et le chardonnay sont concernés.

Le troisième article propose un entretien avec Serge Zaka, agrométéorologue chez itk. Ce dernier note que lors de cet épisode de gel certaines villes ont perdu jusqu’à 35 degrés du jour au lendemain et qu’à l’échelle de la France, “un changement aussi soudain de température moyenne (…) au mois d’avril, avec une telle amplitude (>10°C) est inédit depuis au moins 1947”. Selon lui c’est surtout la douceur qui a précédé cet épisode de gel qui est à retenir. Ainsi, il précise que 240 records de chaleur ont été battus en deux jours fin mars. Cette vague de chaleur a fait éclore les bourgeons de manière précoce. Par conséquent, si la vague de froid du mois d’avril n’est pas à proprement parler exceptionnel, elle est arrivée alors que ces bourgeons étaient à l’air libre et ne résistent en général pas à des températures inférieures à -1°C (contre -20°C lorsqu’ils n’ont pas éclos). In fine, selon lui, “une chose que l’on pourrait améliorer, c’est la prévention de ces fortes gelées qui succèdent à la douceur” car “il y a une lacune au niveau institutionnel”.

Enfin, le quatrième article s’intéresse à l’arboriculture, qui a également souffert fortement de cet épisode de gel. Dans la Drôme et l’Ardèche, la quasi-totalité des productions d’abricots, de cerises et de pêches ont été gelées.

On y apprend également que la plupart des exploitations arboricoles ne sont pas assurées contre le gel car « les épisodes de gel et de grêle se multiplient et il est devenu presque impossible de trouver des compagnies d’assurances qui acceptent d’assurer les arboriculteurs ».

Enfin, au delà des arboriculteurs, l’article précise que c’est également une myriade d’entreprises spécialistes de la distribution et de la transformation des fruits locaux qui sont fragilisées car privées de matières premières. 

Une bon début de saison pour l’asperge

Le Monde, Après une année 2020 plutôt bonne, « l’asperge reste droite dans ses bottes » en 2021, 10/04/2021

Un article sur un légume de saison. On y apprend que malgré les craintes lors du premier confinement de mars 2020, la filière asperge française a limité la casse. La coopérative Copadax a, par exemple, vu ses volumes baisser de 5 à 10% mais comme les prix ont été en hausse, son chiffre d’affaire a progressé de 10% par rapport à 2019.

Si en ce début d’année 2021 les restaurants sont de nouveaux fermés, les asperges landaises commencent à arriver sur les étals et les prix sont en légère hausse par rapport à l’an dernier.

Néanmoins, le gel qui a frappé le territoire français la semaine dernière aura également un impact sur les volumes d’asperges, notamment dans les Landes où un producteur explique qu’il a perdu 15 à 20% de sa production en deux jours.

On apprend également que l’Allemagne est le premier producteur européen d’asperges, loin devant la France et ses 20 000 tonnes par an.

Un nouveau livre sur l’anti-gaspi

“La cuisine des beaux restes”, Estérelle Payany

La journaliste culinaire Estérelle Payany vient de sortir un nouvel ouvrage culinaire antigaspi intitulé “La cuisine des beaux restes”, qui est consacré à la cuisine des restes.

Comment transformer ses restes de raclette en muffins, réaliser des pickles de peau de pastèque ou encore des blinis de carottes râpeés? Que faire avec un reste de jaune d’œuf, un fond de bouteille de vin ou du pain rassi ?

Pour aller plus loin, elle a demandé à 7 cheffes et cuisinières : Manon Fleury, Chloé Charles, Anna Trattles et Alice Quillet de Ten Belles, Alessandra Montagne-Gomes du restaurant Nosso, et Christel Régis de la boulangerie Persephone, une de leurs recettes anti-gaspi et quelques-unes de leurs astuces.

Vous le trouverez dans toutes les bonnes librairies.

Le groupe Avril se sépare des protéines animales

Le Figaro, Avril cède ses œufs Matines et ses activités d’abattage de porc, 13/04/2021

Le groupe Avril, spécialiste des huiles et des protéines végétales, a décidé de se recentrer complètement sur ces activités et a donc annoncé vouloir se séparer de ses activités de transformation animale. Il va donc mettre en vente sa filière œufs, composée de la marque grand public Matines et de la marque d’ovoproduits Ovoteam, mais également ses activités dans le porc (Abera). Au total, le groupe va se séparer d’environ 8,5% de son chiffre d’affaires.

Si le groupe était un acteur majeur dans l’œuf, avec environ 2 milliards d’unités vendues chaque année, sa filiale ovoproduits a naturellement souffert en 2020 de la fermeture des restaurants. Sa filiale Matine a, quant à elle, souffert depuis plusieurs années de la nécessité de sortir de l’élevage en cage.

Ces startups qui se lancent dans le faux-mage, le fromage végétal

Wired, The quest to make genuinely cheesy dairy-free cheese, 08/04/2021

Un article complet sur ces startups qui se lancent dans la fabrication de fromage sans produits laitiers.

Que ce soit les ersatz de camembert à la noix de cajou, du faux stilton à la noix de coco ou encore des bûchettes de mozzarella à base d’amidon de riz, ce secteur est en plein boom aux Etats-Unis où sa croissance était de +18% en 2019 (contre seulement 1% pour les fromages traditionnels). Par ailleurs, selon les prévisions le marché mondial du fromage végétalien devrait atteindre 7 milliards de dollars d’ici 2030. Il connaît un boom également au niveau de la fabrication, celle-ci se faisant de plus en plus à partir de fermentation à base de plantes.

Le problème à régler pour ces startups n’est tout de même pas simple : toute personne qui en a acheté, goûté ou senti confirmera que ce ne sont pas des fromages. Que ce soit au niveau de la texture ou du goût, le résultat est encore assez loin des fromages traditionnels. Comme le dit l’article, “on n’oublie pas vraiment sa première mauvaise expérience de fromage végétalien”.

L’article raconte ensuite le parcours du co-fondateur de Perfect Day qui, suite à une mauvaise expérience avec un fromage végétalien s’est intéressé à ce qui faisait la différence entre un fromage traditionnel et un fromage végétalien. Il a trouvé que deux produits typiques du lait manquent à ces alternatives végétales : la caséine et les protéines de lactosérum. Ce sont les blocs moléculaires qui, combinés, donnent au lait (et, en fin de compte, au fromage) sa texture unique, son goût et son crémeux. La caséine en particulier est le composant coagulant qui permet au vrai fromage de s’étirer ou de fondre.

Aujourd’hui, Perfect Day a déjà levé 360 millions de dollars, et fait face une concurrence de plus en plus importante, avec notamment l’américaine New Culture, qui utilise une méthode similaire de réplication des protéines pour produire des boules de mozzarella, la singapourienne TurtleTree Labs, qui a transformé des cellules de vaches, de chèvres et même de chameaux en lait produit par bioréacteur ou encore Impossible Foods qui, après son succès dans les substituts à la viande, a annoncé en octobre 2020 que des travaux étaient en cours sur un prototype d’Impossible Milk.

La ruée vers ce nouvel or blanc est belle et bien en marche.

L’évolution de la FoodTech en 2020

DigitalFoodLab, FoodTech in Europe in 2020

Digital Food Lab vient de sortir la quatrième édition de son rapport sur la FoodTech en Europe.

On y apprend notamment qu’en 2020, les startups européennes de la FoodTech ont levé 2,7 milliards d’euros, soit autant qu’en 2019.

Néanmoins, et malgré la pandémie, le montant total investi dans les startups FoodTech au niveau mondial a fortement augmenté et la part de l’écosystème FoodTech européen a donc baissé et ne représente plus que 12%.

Digital Food Lab met également en avant une troisième vague de startups FoodTech européennes qui se caractérise par deux éléments clés : elles lèvent davantage de fonds à un stade très précoce (avant même d’avoir un produit) et parient sur des tendances à long terme.

Vous pouvez télécharger gratuitement le rapport ici.

Le vin de l’espace de retour sur terre

Financial Times, Space wine: what a trip to the stars did for a case of Petrus, 07/04/2021

La startup française Space Cargo Unlimited (SCU) s’est fixée pour objectif de déterminer si les réponses aux problèmes de l’agriculture terrestre se trouvent au-delà de la Terre. L’entreprise prévoit ainsi 6 expériences au cours des prochaines années sous la bannière de Mission Wise, un programme de recherche privé lancé par Nicolas Gaume, le co-fondateur. Pour cet essai, SCU a envoyé 12 bouteilles de Petrus dans la Station spatiale internationale (ISS). C’était la première fois que les expériences réalisées au sein de la station spatiale impliquaient des bouteilles de vin. Entre leur décollage en novembre 2019 et leur retour en janvier 2021, les bouteilles ont passé 14 mois à parcourir 300 millions de kilomètres, en orbite autour de la Terre 16 fois par jour. Suite à une première dégustation effectuée début mars, certaines personnes ont trouvé des saveurs manifestement différentes dans les vins qui avaient séjourné dans l’espace, comme des tanins et des fruits plus doux, ainsi que des arômes plus prononcés de fleurs, de fumée et de truffe, typiques de vin de Petrus ayant vieilli quelques années de plus.

L’an dernier, SCU avait envoyé 320 sarments de vigne pour étudier l’impact de l’absence de gravité sur la vigne. Moitié Cabernet Sauvignon et moitié Merlot, les pieds sont désormais dans la pépinière de vignes Mercier en France et poussent visiblement plus vite que leurs homologues témoins. Une fois qu’ils seront bien établis, ils seront exposés aux maladies courantes de la vigne et aux défis climatiques tels que le manque d’eau pour voir si les conditions de l’ISS les ont rendus plus aptes à faire face aux stress de retour sur Terre. Prochaine étape pour SCU : faire fermenter le moût de raisin dans l’espace.

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