Eat’s Business #12
Dans ce nouvel épisode de Eat’s Business, la revue de presse du Business de la Bouffe, Olivier Frey et Daniel Coutinho reviennent sur l’évolution du Bio en 2020, le rachat de Leerdammer à Bel par Lactalis et la consommation d’eau en bouteille.
Dans cet épisode, sont aussi évoqués la transition durable et sociale de l’alimentation, Everli nouveau spécialiste de la livraison de courses à domicile en France, la mondialisation du KitKat et les solutions pour réutiliser ses déchets alimentaires.
Consommation de produits biologiques
L’édition 2021 du baromètre de consommation et de perception des produits biologiques en France
L’Agence Bio suit depuis plus d’une décennie, la perception et la consommation des produits biologiques auprès de la population nationale. Mais l’année 2020 étant une année exceptionnelle vu le contexte de la crise sanitaire liée au Covid-19, les enseignements de ce baromètre sont multiples.
Tout d’abord, pour la quatrième année consécutive, il y a une stabilisation de la croissance de la consommation mensuelle des produits biologiques a un taux dépassant les 70% (73% en 2020). A l’inverse, le taux de non consommateurs absolus, réfractaires aux produits biologiques est également stable depuis 3 ans, aux alentours de 10%.
Au niveau des habitudes alimentaires, le fait de cuisiner davantage enregistre une progression impressionnante (+8 points par rapport à l’année précédente).
Par ailleurs, le bio a séduit 15% de nouveaux consommateurs en 2020 et plus d’un quart de ces nouveaux consommateurs ont commencé à consommer des produits biologiques à partir du premier confinement.
Au niveau des produits consommés, les fruits et légumes bio sont en tête (81% des consommateurs bio en consomment au moins 1 fois) devant les oeufs (69%) et le lait (44%).
Enfin, pour l’ensemble des Français (consommateurs ou non), le prix continue d’être le frein majeur à consommer plus de produits bio (tout particulièrement pour les moins de 25 ans).
L’étude complète est à télécharger ici.
La fin des rivalités entre Lactalis et Bel
Le Figaro, Le mariage forcé entre Lactalis et Bel touche à sa fin, 19/03/2021 + Challenges, Lactalis rachète Leerdammer à Bel, 22/03/2021
Le groupe Bel a décidé de céder un de ses joyaux, le fromage Leerdammer, ainsi que les filiales Bel Italie, Bel Allemagne, Royal Bel Leerdammer aux Pays-Bas et Bel Shostka en Ukraine, à son concurrent Lactalis. Cette opération est valorisée aux alentours de 600 millions d’euros, selon Emmanuel Besnier, le PDG de Lactalis.
Mais la particularité de cette transaction est que Lactalis ne déboursera pas un centime. Lactalis récupérera en effet Leerdammer en échange de 1.591.472 actions du groupe Bel selon Challenges, soit environ 23% de son capital. Lactalis ne détiendra ainsi plus que 0,9% du capital de Bel au terme de cette opération.
Comme le rappelle l’article du Figaro, “l’opération va dans le sens du rééquilibrage du portefeuille du groupe familial entre ses activités historiques laitières (…) et les produits fruitiers et végétaux”. Elle marque également la fin d’une histoire de rivalité entre deux familles emblématiques dans le monde du fromage français. L’article précise en effet que la famille Besnier, qui contrôle Lactalis, était entrée au capital du groupe Bel dans les années 1990 suite à une prise de participation opportune réalisée par le père de l’actuel PDG du groupe. Au fil du temps, ce dernier avait acquis notamment auprès d’un membre de la famille de son concurrent jusqu’à 28,5% de la holding familial du groupe Bel. Cette opération était, selon l’article du Figaro, “très probablement destinée à mettre la main sur son rival” et a été vue comme une “agression brutale” par la famille Fiévet, propriétaire du groupe Bel, malgré le fait que Lactalis n’ait jamais été jusqu’à prendre le contrôle de Bel.
Selon Challenges, le groupe Bel a par ailleurs annoncé qu’à l’issue de cette opération, il a l’intention de se retirer de la bourse.
Transition durable et sociale de l’alimentation
La Tribune, Un an de crise : “Il faut repenser l’alimentation durable à l’aune de l’inclusion sociale”, 22/03/2021
La Tribune propose un entretien intéressant avec Nicolas Bricas, socio-économiste de l’alimentation au Cirad, pour qui il est “indispensable de co-construire un projet alimentaire sociétal mobilisant tous les citoyens”.
Selon lui, le phénomène le plus important induit par la crise sanitaire liée au Covid-19 est le fort accroissement de la précarité alimentaire. Le pouvoir d’achat de nombreux français s’est en effet effondré, notamment pour ceux qui travaillent dans la restauration, dans le spectacle ou encore pour les étudiants. Par conséquent, l’ensemble de la classe moyenne inférieure se tourne désormais vers une alimentation moins chère. Or améliorer la durabilité de l’alimentation entraîne bien souvent une hausse du prix des aliments, qui viendrait se heurter à ce qu’il nomme la “paupérisation silencieuse”.
Ainsi il met en avant l’idée qu’une transition durable de l’alimentation doit “être repensée dans une mécanique d’inclusion sociale générale, permettant à tout le monde, et non pas seulement à une élite éduquée et à fort pouvoir d’achat, d’en faire partie”. Si, selon lui, “l’alimentation bon marché est possible seulement au prix d’une dégradation de l’environnement et d’une précarisation des conditions de travail”, la hausse des coûts induites par “la réintégration dans la valeur des aliments d’externalités environnementales et sociales” ne pourra être possible “qu’en en faisant adhérer toute la société à la nécessité d’intégrer aux prix ces externalités”.
Eau en bouteille : luxe ou nécessité ?
Financial Times, Bottled water should be a luxury, not a necessity, 19/03/2021
En 2020, les ventes d’eau en bouteille de Danone ont chuté de 17%. Une raison à cela : la pandémie de Covid-19 a montré que nous avons une eau parfaitement bonne à portée de main avec l’eau du robinet et que nous n’avons pas besoin de boire de l’eau de source dans des bouteilles en plastique ou en verre.
Comme l’a écrit un jour Richard Wilk, professeur d’anthropologie, dans un article de recherche sur l’eau en bouteille, “amener les gens à payer pour des choses qu’ils ont déjà en abondance” est un exploit pervers.
Mais c’est également l’empreinte écologique de l’eau en bouteille qui est mise en cause, que ce soit le fait de transporter de l’eau sur de longues distances ou le fait qu’elle soit conditionnée dans des bouteilles plastiques finissant dans des décharges ou des océans. Mais, comme le précise l’article, le problème majeur est que des milliards de personnes boivent de l’eau en bouteille par nécessité, soit parce que l’alternative publique n’est pas sûre, soit parce qu’il n’y en a pas du tout.
L’article rappelle d’ailleurs que l’économiste Adam Smith avait en son temps relevé le paradoxe suivant dans son ouvrage “La richesse des nations” : l’eau, qui est pourtant essentielle à la vie, est moins chère que les diamants, qui sont un luxe. Ceci est dû au fait que quelqu’un qui dispose de beaucoup d’eau n’accorde pas une grande valeur à un verre d’eau supplémentaire, son utilité marginale est dite faible.
Everli, un nouveau spécialiste de la livraison de courses à domicile en France
LSA, Everli, l’Instacart italien, détaille son offensive en France, 24/03/2021
Après le hollandais Picnic, c’est un nouveau spécialiste de la livraison de courses à domicile qui arrive dans l’Hexagone. Cette fois-ci, il s’agit de l’italien Everli qui a débarqué à Lyon début février.
LSA a pu s’entretenir avec le CEO d’Everli, Federico Sargenti. Ce dernier affirme ainsi que son entreprise ambitionne de devenir l’ “Instacart européen”. Pour rappel, Instacart est un site américain qui propose de la livraison de courses collaborative. Ainsi, comme l’explique LSA, Everli connecte des consommateurs en ligne à une communauté de “shoppers”, qui se rendent physiquement dans le magasin, y effectuent le picking et leur livrent ensuite directement les produits d’épicerie le jour même.
On y apprend également que l’entreprise italienne a réalisé 110 millions d’euros de volumes d’affaires en 2020 et que La France devient le quatrième pays où Everli s’implante, après l’Italie, la Pologne et la République Tchèque.
Everli est actuellement en train de se rapprocher de différents acteurs de la grande distribution en France. Selon le PDG, son offre complète celles déjà en place comme le drive ou la livraison classique. Comme il l’explique, “notre proposition est d’offrir la livraison à domicile de gros paniers le jour même partout en France, de manière très efficace pour les distributeurs en termes de coûts”. Ainsi, pour les distributeurs français Everli représente “un canal additionnel et des ventes incrémentales”.
Mondialisation du Kitkat
Financial Times, How the KitKat went global, 18/03/2021
Un article qui parle de la mondialisation de l’alimentation en prenant l’exemple du KitKat et notamment de son développement au pays du soleil levant.
On y apprend que le KitKat a été inventé en 1930 en Angleterre, lorsqu’un employé a suggéré à Henry Rowntree, le patron de la chocolaterie du même nom, de mettre au point une friandise “qu’un homme pourrait emporter au travail dans son sac”. Suite à cela, l’entreprise a lancé la gaufrette recouverte de chocolat au lait que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de KitKat. Son slogan “Have a break, have a KitKat”, inventé à la fin des années 1950, perdure d’ailleurs encore aujourd’hui.
KitKat est arrivé au Japon dans les années 1970 où il a été, dans un premier temps, vendu comme une friandise exotique “britannique”. Rowntree a été racheté en 1988 par Nestlé et, malgré la puissance marketing de la multinationale, KitKat a eu du mal à concurrencer les confiseries des producteurs locaux comme Glico. A tel point qu’au début des années 2000, les cadres de Nestlé au Japon, se sont demandés si la marque KitKat avait un véritable avenir dans le pays.
Mais un jour, un responsable local de Nestlé s’est rendu compte que les ventes de KitKats sur l’île de Kyushu, au sud du Japon, explosaient entre décembre et février. Une explication s’est dégagée pour expliquer ce phénomène : les étudiants avaient remarqué que le mot “KitKat” ressemblait à l’expression japonaise “kitto katsu” (“tu surmonteras”). Ils s’offraient donc un KitKat comme porte-bonheur pour traverser l’épreuve du juken, une sorte d’équivalent japonais du Bac. L’équipe japonaise n’a pas osé remplacer le fameux slogan “Have a break” par “Kitto katsu” car ils savaient que le groupe voulait maintenir une cohérence entre les marques mondiales. Mais ils ont néanmoins décidé d’utiliser la phrase “Kitto sakura saku yo ! (“les souhaits se réalisent !”) dans leurs publicités japonaises.
Et les ventes de KitKats ont commencé à exploser chez les étudiants japonais.
Réutiliser ses déchets alimentaires
Fast Company, Banana peel bacon and sauce packet meatloaf : Ikea wants you to cook with food waste, 23/03/2021
Un article déniché par Eileen Cho.
Et il s’agit d’une initiative intéressante de la part de Ikea Canada, qui vient de sortir un livre de cuisine anti-gaspillage alimentaire dans lequel on trouve des recettes réalisées à partir de déchets alimentaires tels que des pelures de pommes, des croûtes de fromages, des peaux de bananes ou encore du marc de café. Les recettes ont été concoctées par des chefs nord américains.
On y trouve également quelques astuces permettant d’utiliser des déchets alimentaires non comestibles, comme par exemple les coquilles d’œuf qui peuvent être moulues pour en faire une poudre servant à éliminer les dépôts calcaires dans la salle de bain, ou encore le marc de café qui peut être utilisé pour réaliser un masque exfoliant pour le visage.
Intitulé Scrapsbook, celui-ci peut être téléchargé gratuitement au format PDF (en anglais).