Eat’s Business Spécial Fêtes de Fin d’Année
Dans ce nouvel épisode de Eat’s Business, la revue de presse du Business de la Bouffe, Olivier Frey et Daniel Coutinho reviennent sur les actualités les plus importantes pendant la période des fêtes. Aujourd’hui on parle du foie gras, pas le bienvenu à Noël et du mariage entre les deux leaders du marché.
On continue avec le retour en grâce du Champagne, la puissance politique du sucre, des cocktails sans alcool et les prévisions de ce que mangerons les Américains en 2022.
Le Figaro, Quand les animalistes veulent faire la peau au foie gras, 09/12/2021
Quatre grandes villes ont déjà retiré le foie gras au menu de leurs réceptions sous la pression d’associations animalistes au premier rang desquels Peta.
Dans un courrier envoyé à la mairie de Strasbourg, Peta écrit ainsi “en raison de la production importante de foie gras en Alsace, et de l’imminence de ses célèbres marchés de Noël – où des stands en font justement la promotion – un engagement officiel de votre part aurait un très fort impact! Ainsi, pourriez-vous mettre en place une politique interdisant de servir du foie gras dans vos locaux et lors des repas officiels offerts par la municipalité strasbourgeoise à diverses occasions?”. Peta a ainsi écrit un courrier similaire à une vingtaine de maires de grandes villes.
Comme alternative au foie gras, les associations animalistes proposent de déguster du “faux gras”, qui est fabriqué à partir de tofu, champignon, levure et huile végétale.
Si certains maires ont entendu le message de Peta et ont pris des décisions radicales (comme la maire de Strasbourg par exemple) il semble que les Français soient encore loin de passer au “faux gras”. D’après un sondage CSA pour le CIFOG publié récemment, 91% des personnes interrogées déclarent manger du foie gras et 75% ont l’intention de consommer du foie gras pour les fêtes cette année, soit 2 points de plus que l’an dernier.
Par ailleurs, 14 associations, représentant plusieurs dizaines de milliers de chefs à travers tous les territoires de France et à l’international, se sont d’ores-et-déjà engagés auprès de la filière française du Foie Gras en signant le manifeste de soutien à la filière française du foie gras et un hashtag #TouchePasMonFoieGras a été lancé pour l’occasion.
Les Échos, Les deux géants du foie gras Maïsadour et Euralis se rapprochent, 08/12/2021
Alors que la filière foie gras a souffert ces dernières années suite à la multiplication des épidémies d’influenza aviaire, les deux leaders du secteur, les groupes coopératifs Euralis et Maisadour, réfléchissent à fusionner leurs pôles spécialisés dans le canard à foie gras. Les deux groupes représentent environ 45% de la production française de foie gras avec une production de 13 millions de canards gras chaque année. Les deux groupes ont également des marques fortes dans ce secteur : Delpeyrat et Comtesse du Barry (Maisadour) et Rougié et Maison Montfort (Euralis).
L’article explique que la production de foie gras a quadruplé depuis le début des années 90 et que la filière souffre désormais de surproduction.
Ils doivent toutefois obtenir l’aval des autorités de la concurrence pour un plan qui pourrait déboucher sur des restructurations
Le Monde, La puissance politique du sucre, entre délices et dominations, 24/12/2021
Un article très complet sur l’histoire du sucre et ses liens avec le capitalisme, la mondialisation, l’esclavagisme et la politique.
Quelques chiffres pour commencer : entre le début du confinement et la fin du mois de mai 2020, les ventes de sucre ont augmenté de 30 % en France. Si la peur de la pénurie a probablement joué un rôle comme pour certains autres produits, une enquête réalisée par le Centre des sciences du goût et de l’alimentation a montré que cette période a favorisé le « manger émotionnel ».
Comme le résume bien l’article, “le sucre raconte, à sa façon, la part intime de l’histoire des hommes et des femmes, de leurs joies et de leurs détresses, de leurs peurs et de leurs espoirs”. Mais surtout, “il est aussi, aux côtés des céréales, l’un des produits qui, à travers les siècles, décrit le mieux l’histoire des peuples, la violence des empires et la naissance d’une mondialisation dont il est un acteur central”.
Le sucre a pendant longtemps été un “marqueur de distinction sociale et de richesse” et était réservé aux élites. Il est en effet source de plaisir et le goût sucré est devenu très tôt un marqueur social de pouvoir et un enjeu politico-religieux. Mais désormais il est présent dans tous les placards. A tel point que, depuis quarante ans, la recherche en sciences sociales s’interroge sur la raison pour laquelle “cet ingrédient jugé non essentiel aux besoins alimentaires cristallise autant les passions, au point de modeler les paysages et de peser sur les politiques publiques”.
L’article propose ainsi un historique politique du sucre permettant de mieux comprendre l’ambivalence de nos comportements à son égard et d’éclairer l’origine des rapports de force dont il fait aujourd’hui l’objet.
Le Monde, Des ventes record pour les maisons de champagne, 10/12/2021
2020 a été une des pires années pour la filière champagne avec “des pertes de 20 % en moyenne par rapport à 2019” et, début 2021, le Comité interprofessionnel du vin de Champagne pensait qu’il faudrait plusieurs années au secteur pour s’en remettre. Et bien contre toute attente 2021 s’annonce comme une année record.
C’est ce que confirme Fabrice Rosset, PDG des champagnes Deutz, qui explique “en près de cinquante ans de métier, je n’ai jamais vécu une période semblable !”. Les conséquences sont visibles : ruptures de stock un peu partout dans les grandes marques, demandes de pays étrangers qui ne sont pas satisfaites, tensions sur le marché, des cavistes français qui ne reçoivent pas la marchandise qu’ils ont commandée…
Cela se traduit évidemment au niveau des chiffres. Pour Deutz, c’est une hausse de 80 % des ventes pour la cuvée classique et de 40 % pour la cuvée prestige. Et au niveau de l’entreprise, comme le précise le PDG,“+ 35 % au global par rapport à 2019, qui était notre année record. En chiffre d’affaires global, par rapport à 2020, alors que la réouverture des frontières n’est pas totale et, même si tous les indicateurs ne sont pas au beau fixe, nous dépassons les 60 %”.
Parmi les explications avancées sur les performances exceptionnelles de cette année : la consommation mondiale de 2020 aurait été supérieure aux expéditions des maisons de champagne. En d’autres termes, les grossistes, importateurs et cavistes ont vendu leurs bouteilles et laissé leurs stocks baisser. Ils ne les auraient reconstitués qu’en 2021. Autre explication : l’explosion du e-commerce, en France mais surtout à l’étranger où les ventes en ligne ont été multipliées par quatre dans certains pays. Enfin les habitudes des consommateurs dans certains pays ont évolué. C’est ce qu’explique Quentin Meurisse, directeur marketing pour les maisons Mumm et Perrier-Jouët, “Aux Etats-Unis, la cuvée Mumm “Grand Cordon ” est habituellement bue au restaurant. Pour la première fois, à cause des confinements, les Américains l’ont commandée en ligne et consommée à la maison. Quand les restaurants ont rouvert, ils y ont à nouveau acheté nos bouteilles mais ils ont aussi continué à en boire chez eux”.
CNBC, People are paying top dollar for cocktails with no alcohol in them, 09/12/2021
En 2020, l’industrie des boissons sans alcool a connu une croissance fulgurante, les consommateurs délaissant les soirées arrosées pour privilégier leur santé et leur bien-être. Alors que certaines personnes réduisent complètement leur consommation, d’autres optent pour des boissons qui ont le même goût que leurs boissons préférées, mais sans alcool.
Mais la plupart des consommateurs de ces boissons n’abandonnent cependant pas l’alcool pour de bon. Selon une étude réalisé par IWSR, 58 % des consommateurs de boissons sans alcool ou à faible teneur en alcool continuent de boire de l’alcool, mais avec modération.
Aux Etats-Unis, selon des données de NielsenIQ, les ventes de boissons non alcoolisées ont augmenté de 33,2 % en 2020, pour atteindre 331 millions de dollars. Les ventes de bière et de cidre non alcoolisés ont augmenté de 31,7 %, mais surtout les ventes de spiritueux non alcoolisés ont augmenté de 113,4 % au cours de la même période.
Parmi les sociétés proposant des spiritueux sans alcool, l’article cite la société CleanCo. L’article parle également de Lyre’s, une start-up fondée en 2019 et qui vient de boucler une levée de fonds de 20 millions de livres en novembre. L’entreprise est désormais évaluée à 270 millions de livres.
New York Times, How Will Americans Eat in 2022? The Food Forecasters Speak, 28/12/2021
Comme à chaque début d’année, chacun s’adonne à l’exercice des prévisions. Le New York Times en proposent certaines récoltées auprès d’experts du secteur. Pour cette année, comme le résume bien Anna Fabrega, qui a récemment pris la direction du service d’abonnement aux repas Freshly, “la contrainte engendre l’innovation”.
Selon elle et d’autres experts de l’industrie alimentaire aux États-Unis, 2022 sera de nouveau une année pragmatique façonnée par les besoins des personnes qui travaillent à domicile et par la génération Z, culinairement astucieuse mais capricieuse, dont les membres veulent des aliments contenant des ingrédients durables et une histoire culturelle forte, préparés sans exploitation et livrés de manière neutre en carbone dans les 30 minutes.
Voici les prédictions mentionnées dans l’article :
- Ingrédient de l’année : les champignons figurent sur de nombreuses listes de prédictions, sous presque toutes les formes, des champignons psilocybines (suite au regain d’intérêt pour les substances psychédéliques) aux pleurotes qui sont utilisées comme substituts végétaux aux coquilles Saint-Jacques.
- Boisson de l’année : les boissons des années 1980 (Tequila Sunrise, les Long Island Iced Tea…) reviennent en force remaniés avec des jus frais, moins de sucre et des alcools de meilleure qualité. Autre tendance : l’essor des “éco spiritueux”, fabriqués à partir d’ingrédients provenant de fermes locales ou de déchets alimentaires et emballés et expédiés selon des méthodes respectueuses du climat.
- La viande de poulet cultivée en laboratoire : les poulets à base de plantes proposés par des entreprises comme Impossible Foods et Beyond Meat sont arrivés récemment dans les épiceries et les restaurants.
- Les algues à la rescousse : le varech pousse rapidement, présente un profil nutritionnel intéressant et élimine le dioxyde de carbone de l’atmosphère et l’azote de l’océan. En conséquence, le varech d’élevage va dépasser le stade du dashi et des menus de certains restaurants haut de gamme pour se retrouver dans des aliments de tous les jours comme les pâtes.
- Nostalgie des bonbons : les nostalgies d’enfance de la Chine (le bonbon White Rabbit et les flocons de grésil) et de la Corée du Sud (la friandise en forme de nid d’abeille ppopgi et les pailles Apollo) feront leur chemin dans les caddies et les recettes de desserts et de boissons des Américains.
- La montée en puissance du robusta : face à l’envolée des prix de l’arabica, le robusta, qui est moins cher et plus facile à cultiver, va revenir en force. On le trouve notamment au Vietnam et en conséquence un nouveau style de café vietnamien est en train d’apparaître dans de nombreuses villes américaines.
- Une vaisselle savoureuse : la qualité des cuillères, baguettes, assiettes, bols et tasses comestibles augmente et leur prix diminue, ce qui marque le début d’une véritable révolution des emballages comestibles.
- La saveur de l’année : l’hibiscus, qui ajoute sa teinte cramoisie et sa saveur acidulée et terreuse à tout, des cocktails aux sodas en passant par les crudités et les yaourts.
- L’Inde en point de mire : les aliments régionaux de l’Inde feront l’objet d’une grande attention, avec des plongées approfondies dans les plats du Gujarat, du Kerala, du Cachemire, du Tamil Nadu et de la région d’Awadh.
- L’ambiance de l’année : un intérêt croissant pour la nature historique et culturelle de la nourriture et son impact sur le climat ne fera qu’ajouter à ce que les prévisionnistes disent être un nouvel accent sur la gentillesse et la compréhension.
Au-delà des grandes tendances, l’article met en avant certaines autres tendances naissantes : le bacon Koji, l’alcool chinois baijiu, la soupe de nouilles laksa, le riz jollof, les graines prendront le pas sur les noix en tant que source alternative de protéines, un regain d’intérêt pour les fromages sans lait provenant d’un animal, le lait de pomme de terre, le moringa, les plats de petit-déjeuner taïwanais, le thé et les olives.