Eat’s Business #28
Dans ce nouvel épisode de Eat’s Business, la revue de presse du Business de la Bouffe, Olivier Frey et Daniel Coutinho reviennent sur les actualités food de la semaine. Aujourd’hui nous avons un épisode qui va particulièrement s’intéresser au e-commerce alimentaire. Nous allons parler du rachat d’Epicery par La Poste, avec la participation de son fondateur Edouard Mohrange, de PicNic qui a bouclé une levée de 600 millions d’euros et de comment l’e-commerce plombe les marges des acteurs de la distribution alimentaire.
Nous allons également parler de l’importance du Colza dans la transition écologique, du phénomène du Poké Bowl et des vins en byodinamie.
La Poste achète Epicery
Les Echos, Livraison : la start-up de produits frais Epicery cédée à La Poste, 17/09/2021
La Poste a annoncé la semaine dernière avoir racheté, via sa filiale GeoPost/DPDgroup, 88,9 % des parts d’Epicery, une start-up qui permet de se faire livrer des produits frais de commerçants de quartier.
Epicery est une place de marché qui travaille avec environ un millier de commerçants et artisans et les aide à se développer en ligne et en leur permettant de livrer leurs clients à domicile. En échange, Epicery leur fait payer un abonnement et prélève une commission sur les ventes. La startup est actuellement présente dans 5 villes (Paris, Bordeaux, Toulouse, Lille et Lyon).
Comme l’explique Edouard Morhange, le fondateur, « notre volume d’affaires a augmenté de 400 % entre 2019 et 2020 ».
Si le rachat par La Poste peut surprendre, l’article rappelle qu’Epicery travaille avec une filiale de La Poste, Stuart, pour la livraison. Ce rachat permettra d’accélérer la croissance d’Epicery, qui prévoir de s’implanter dans une dizaine de villes françaises supplémentaires en 2022.
PicNic lève 600 millions d’euros
Republic-retail, Le supermarché en ligne PicNic lève 600 millions d’euros et séduit la fondation Bill & Melinda Gates, 16/09/2021 + ECommerce Mag, Picnic : “Nous voulons nous adresser à un marché de masse”, 20/09/2021
La startup néerlandaise PicNic vient d’annoncer l’une des plus grosses levées de fonds de ces derniers mois. Avec 600 millions d’euros, il s’agit, selon l’article, d’un nouveau record pour le secteur du retail. Cette levée de fonds est déjà la 5è pour PicNic (après avoir levé 10 millions d’euros en 2015, 35 millions d’euros en 2016, 100 millions d’euros en 2017 et 250 millions d’euros en 2018). Cette fois-ci, en plus des 4 investisseurs historiques, c’est la fondation Bill et Melinda Gates qui fait son entrée au capital. L’entreprise fait évidemment son entrée dans le cercle fermé des licornes.
PicNic vient par ailleurs de valider son test dans la région de Valenciennes et va se développer en France en se concentrant, dans un premier temps, sur les Hauts de France.
Cette nouvelle levée de fonds doit permettre à PicNic d’accélérer son développement, en investissant dans ses infrastructures (développement de centres de distribution automatisés, renforcement de véhicules électriques) et ses équipes, avec à plus long terme l’objectif de s’implanter dans de nouveaux pays. Comme l’explique Grégoire Borgoltz, responsable croissance et distribution de PicNic France, « notre but est de devenir le leader européen des supermarchés en ligne, mais nous nous concentrons en premier lieu sur les Pays-Bas, l’Allemagne et la France ».
Dans l’article de Ecommerce Mag, le PDG et co-fondateur Michiel Muller détaille les grandes étapes du développement de l’entreprise. L’entreprise a été lancée en 2015 aux Pays-Bas. Elle est devenue l’an dernier le n°2 des distributeurs en ligne hollandais devant Jumbo. En 2018, PicNic a réalisé sa première expansion à l’étranger en s’installant dans 4 villes allemandes. Et en 2021, ce fut le tour de la France.
Concernant les dépenses effectuées par les clients, Michiel Muller précise que la plupart d’entre eux effectuent une commande par semaine et 20% en font deux. Le panier moyen est compris entre 60-70 euros. Au niveau des anecdotes, le PDG explique que les allemands achètent beaucoup de pommes de terre, que le lait est l’article le plus acheté aux Pays-Bas et que dans le Top 10 en France on trouve principalement des produits frais.
PicNic vise le milliard d’euros en volume d’affaires à la fin de cette année.
L’e-commerce plombe les marges
LSA, L’e-commerce plombe les marges des distributeurs alimentaires [Etude], 15/09/2021
Nous avions déjà abordé ce sujet en début d’année. Le développement spectaculaire du e-commerce alimentaire suite à la crise sanitaire pèse de plus en plus sur les marges des distributeurs. En effet, comme le précise l’article, auparavant le client se déplaçait en magasin et choisissait ses produits dans les rayons. Désormais ce client là reste chez lui. Par conséquent, toute cette partie des courses qui était gérée par le consommateur est rebasculée sur le distributeur. Par conséquent cela implique une hausse des coûts, notamment en ce qui concerne les frais de préparation de commande et éventuellement de livraison à domicile.
Ainsi, d’après une étude Euler Hermes parue mi-septembre, à chaque fois qu’1% des ventes de produits alimentaires bascule de la commercialisation en magasin vers la vente en ligne, ce sont 500 millions d’euros de profits qui sont perdus pour les distributeurs des pays membres de l’Union européenne et du Royaume-Uni. Et encore, ce calcul est basé sur hypothèse optimiste de marge e-commerce nulle. Pour une marge e-commerce de -5%, ce sont 1,2 milliard d’euros de profits qui sont perdus et 1,9 milliard si elles est de -10%.
Le colza, le nouvel “or jaune”
Les Echos, Transition écologique : pourquoi le colza va devenir incontournable, 15/09/2021
Focus sur ce que l’on nomme désormais “l’or jaune végétal”, le colza.
Comme l’explique l’article, le colza est une “plante aux fleurs jaune acide et à l’odeur proche du chou”. Le colza est un oléagineux et est cultivé au nord de la Loire et jusqu’en Scandinavie. Un des avantages du colza est “de produire des graines aussi riches en protéines que le soja après extraction de l’huile”. Mais surtout, le colza a de nombreuses applications. On l’utilise aussi bien pour fabriquer de la colle, des glaces, de la viande, des agrocarburants et même des composants automobiles.
En France, le spécialiste du colza s’appelle Avril (anciennement Sofiprotéol). Si le groupe est surtout connu du grand public pour ses marques d’huiles Lesieur et Puget, il fait partie des quatre + importants triturateurs de colza en Europe, derrière les filiales des américains Cargill, Bunge et ADM. Le groupe réalise un chiffre d’affaires de 5,8 milliards d’euros et emploie près de 7 600 salariés.
L’article nous apprend également que, jusqu’au début des années 2000, il n’existait que 2 débouchés pour le colza, à savoir les biocarburants et tourteaux. Mais désormais, de nouveaux débouchés ont vu le jour car “la pression environnementale pousse les industriels à utiliser des matières premières végétales moins contestées”. Ainsi, on utilise du colza pour fabriquer des biolubrifiants, qui sont utilisés notamment dans la marine. On utilise également des dérivés du colza pour fabriquer les mousses des sièges automobiles ainsi que les panneaux d’isolation thermique des véhicules.
Le colza a également un horizon bien dégagé dans tout ce qui touche à l’alimentation humaine. On peut en effet l’utiliser pour réaliser des galettes, des substituts végétaux à la viande, des boissons et même des glaces, des desserts et des barres pour sportifs.
Le seul problème de cette culture en France : des surfaces qui stagnent et des rendements qui baissent. Ainsi, après un pic de 1,5 million de tonnes en 2017, les récoltes sont redescendues à 1 million de tonnes l’an dernier.
Vins biodynamiques
Le Figaro, Forces cosmiques, rituels ésotériques et êtres surnaturels : ce qui se cache derrière les vins «biodynamiques», 17/09/2021
Alors que les vins bio dynamiques se démocratisent chez les cavistes et dans les bars et les restaurants, Le Figaro s’est intéressé d’un peu plus près à ces vins que certains voient comme “plus bio que bio”. La pratique de la biodynamie reste très minoritaire dans l’Hexagone. Ainsi, on estime qu’environ 0,4% des viticulteurs sont certifiés et 0,03% des maraîchers.
Il faut en préambule bien comprendre ce qu’est la biodynamie. A l’origine de la biodynamie il y a un homme : Rudolf Steiner, qui est connu pour avoir fondé l’anthroposophie qui est, selon l’article, un “mélange pêle-mêle d’éléments du Nouveau Testament, de croyances classiques de l’occultisme occidental (magie, astrologie…), de bouddhisme, de karma et de réincarnation”. Ainsi “la biodynamie n’est donc rien d’autre que l’application des croyances anthroposophiques à l’agriculture”.
Les principes de la biodynamie, établis par Steiner en 1924, reposent sur la croyance en des « forces cosmiques », l’influence de la lune, des planètes et du zodiaque sur la croissance des plantes, l’homéopathie ou l’existence d’êtres surnaturels invisibles (gnomes, ondines, esprits de l’air et du feu…). A l’image de ce curieux mélange qui consiste à “mettre de la bouse de vache dans une corne, l’enterrer puis la laisser fermenter pendant tout un hiver avant d’être diluée et pulvérisée sur les champs”.
Malgré tous ces principes un peu bizarres, l’article précise toutefois que “l’absence de fondement scientifique ne remet pas pour autant en cause la qualité du vin produit en biodynamie”. Mais cette qualité s’expliquerait plus par le fait que « les agriculteurs qui se mettent à la biodynamie sont des gens qui se posent des questions, qui cherchent à améliorer leurs pratiques, qui sont attentifs à leurs cultures, qui prennent grand soin de leurs parcelles ».
Comme le résume bien Marc-André Selosse, professeur de microbiologie et de botanique au Muséum national d’Histoire naturelle à Paris, “il ne faut pas confondre l’imposture intellectuelle que représente la biodynamie et la sincérité des gens qui la pratiquent”.
Le phénomène Poké Bowl
Madame Figaro, Pourquoi il ne faudrait plus manger de poke bowl, 16/09/2021 + Libération, Poke bowl, l’indigestion, 07/09/2021
D’après une étude réalisée par Deliveroo, le poke bowl est le 2è plat le plus commandé au monde sur l’appli derrière le cheeseburger. Ainsi, comme le précise Madame Figaro, la mode du poke bowl a gagné Paris et la province depuis maintenant 5 ans, surfant sur la vague de la “healthy food”.
Toutefois, comme le rappelle Libération, le poke bowl tel que nous le connaissons en France “n’a parfois plus grand-chose à voir avec la recette traditionnelle hawaïenne du poke”, qui comprend du poisson de la pêche du jour coupé en dés associé à de l’huile de sésame, du gingembre, des oignons et des légumes locaux. Chez nous le poke bowl se décline désormais en de nombreuses versions avec des ingrédients aussi variés que des falafels, du tofu, voire du poulet pané ou du porc au caramel. Bref cela n’a plus grand chose à voir avec l’original.
Le plat plaît également pour son côté “diététique”. Selon Alexandra Retion, diététicienne, il contient des protéines, des vitamines, des fibres et des glucides, soit “tout ce dont le corps a besoin réuni en un seul plat”. Toutefois, comme le précise Ninon Gouronnec, chargée de cuisine durable à la Fondation Good Planet, “le riz utilisé par la plupart des enseignes n’a pas le même bienfait que celui qu’on lui attribue d’ordinaire” car il est “trop blanc, trop cuit…” et donc “son indice glycémique augmente”.
Autre critique : l’empreinte environnemental d’un poke bowl. Il est en effet composée en grande partie de saumon (une espèce qui est selon Libération menacée de disparition à l’état sauvage et dont l’élevage industriel est très polluant), d’avocat (dont la culture menace les réserves en eau notamment au Mexique, le premier producteur mondial) ou de mangue. Ces deux derniers produits étant, comme le rappelle Ninon Gouronnec, transportés par avion, bateau et camion avant d’être stockés dans des chambres de maturation.